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Page:Sterne - Œuvres complètes, t3-4, 1803, Bastien.djvu/79

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mon égard dans les trois choses les plus essentielles. — Conception interrompue par une sotte question de ma mère, — nez coupé par la mal-adresse du docteur Slop, — nom de baptême tronqué par l’imbécillité de Suzanne. — Il ne restoit à mon père d’autre ressource que celle de mon éducation ; — aussi s’y adonna-t-il avec autant de zèle que mon oncle Tobie en eût jamais mis à sa doctrine des projectiles ; mais il y avoit entre eux une grande différence. — Mon oncle Tobie avoit tout appris de Nicolas Tartaglia ; mon père n’avoit pas de maître ; il tiroit tout de son propre fonds ; — ou, s’il empruntoit quelque chose des autres, il se donnoit tant de peine pour le tourner et le retourner, jusqu’à ce qu’il devînt propre à son usage, que c’étoit presque le même embarras pour lui.

Mon père y travailla pendant trois ans et plus ; et, au bout de ce temps, il étoit à peine parvenu à la moitié de l’ouvrage. — Comme tous les écrivains, il rencontra des difficultés. Il s’étoit d’abord flatté qu’il pourroit rassembler et faire relier tout ce qu’il avoit à dire dans un seul volume, assez petit pour être pendu au trousseau de ma mère parmi ses clefs : — la matière s’étendoit,