Aller au contenu

Page:Sterne - Œuvres complètes, t5-6, 1803, Bastien.djvu/172

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

La jeune fille s’approcha du secrétaire, où je cherchois si inutilement une carte..... Elle prit d’abord la plume que j’avois replacée, et m’offrit de me tendre le cornet… et cela d’une voix si douce, que j’allois l’accepter : cependant je n’osai pas. Mais, ma chère, je n’ai point de carte, lui dis-je, pour écrire. Qu’importe ; écrivez, dit-elle naïvement, sur telle autre chose que ce soit.

Ah ! je fus tenté de lui dire : je vais donc l’écrire sur tes lèvres…

Mais je suis perdu, me dis-je, si je fais cela. Je la pris par la main, et la menai vers la porte, en la priant de ne point oublier la leçon que je lui avois donnée… Elle promit de s’en souvenir, et elle fit cette promesse avec tant d’ardeur, qu’en se retournant elle mit ses deux mains dans les miennes… Il étoit impossible, dans cette situation, de ne pas les serrer ; je voulois les laisser aller, et je les retenois encore… Je ne lui parlois point, je raisonnois en moi-même… L’action me faisoit de la peine, mais je tenois toujours ses mains serrées… Au même instant je m’aperçus qu’il falloit recommencer le combat ; je sentois tout mon cœur trembler à cette idée.

Le lit n’étoit qu’à deux pas de nous….