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Page:Sterne - Œuvres complètes, t5-6, 1803, Bastien.djvu/21

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d’un moine qui se voue à mendier : telle qu’elle se présente en ce moment à mon imagination, elle gagnoit plus qu’elle ne perdoit à être ainsi.

Il fit trois pas en avant dans la chambre, mit la main gauche sur sa poitrine, et se tint debout avec un bâton blanc dans sa main droite. Lorsque je me fus avancé vers lui, il me détailla les besoins de son couvent, et la pauvreté de son ordre… Il le fit d’un air si naturel, si gracieux, si humble, qu’il falloit que j’eusse été ensorcelé pour n’en être pas touché…

Mais la meilleure raison que je puisse alléguer de mon insensibilité, c’est que j’étois prédéterminé à ne lui pas donner un sou.


LE MOINE.
Calais.


Il est bien vrai, lui dis-je, pour répondre à une élévation de ses yeux, qui avoit terminé son discours… il est bien vrai… Je souhaite que le ciel soit propice à ceux qui n’ont d’autre ressource que la charité du public ; mais je crains qu’elle ne soit pas assez zélée pour satisfaire à toutes les demandes qu’on lui fait à chaque instant.