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Page:Sterne - Œuvres complètes, t5-6, 1803, Bastien.djvu/218

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parce que je sens en moi que cette destruction doit être suivie des plaisirs et des soins les plus doux. Tout vient de toi, grand Émanateur de ce monde ! C’est toi qui amollis nos cœurs et nous rends compatissans aux maux d’autrui. C’est par toi que mon ami Eugène tire les rideaux de mon lit quand je suis languissant, qu’il écoute mes plaintes, et cherche à me consoler. Tu fais passer quelquefois cette douce compassion dans l’ame du pâtre grossier qui habite les montagnes les plus âpres : il s’attendrit quand il trouve égorgé un agneau du troupeau de son voisin… Je le vois dans ce moment, sa tête appuyée contre sa houlette, le contempler avec pitié… Ah ! si j’étois arrivé un moment plus tôt, s’écrie-t-il… Le pauvre agneau perd tout son sang, il meurt, et le tendre cœur du berger en saigne.

Que la paix soit avec toi, généreux berger ! Tu t’en vas tout affligé… mais le plaisir balancera ta douleur, car le bonheur entoure ton hameau… heureuse est celle qui le partage avec toi ! heureux sont les agneaux qui bondissent autour de toi !