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Page:Sterne - Œuvres complètes, t5-6, 1803, Bastien.djvu/690

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la peine de puiser elle-même l’eau thermale ; cet esprit, dis-je, vous eût, dans les premiers temps, fait traverser les forêts et combattre les monstres pour les intérêts de quelque dulcinée que vous auriez à peine vue ; ou peut-être arborer la croix, et parcourir en brave et pieux chevalier, les terres et les mers de la Palestine.

À vous dire le vrai, vous êtes trop enthousiaste : — si vous étiez né pour vivre dans quelqu’autre planète, je pourrois me prêter à toutes ces brillantes et magnifiques puérilités ; — mais je ne le ferai point dans le monde chétif et misérable que nous habitons, dans ce monde où règne la médisance et la perfidie ; — non, en vérité, je ne le ferai pas. — Je prévois très-bien, et je ne fais pas cette prédiction sans qu’il m’échappe un soupir ; je prévois que cette manie vous conduira dans mille pièges, — et quelques-uns d’entr’eux seront tels qu’il ne vous sera pas facile d’en sortir ; — ils vous enlèveront votre fortune, — et vos agréables divertissemens ; — qu’importe, pourrez-vous dire ? il me semble même vous entendre parler ainsi ; — c’est qu’alors vous seriez perdu pour vos amis.

Car si l’inconstante fortune vous enlève votre superbe palefroi avec son harnois doré,