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Page:Sterne - Œuvres complètes, t5-6, 1803, Bastien.djvu/716

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Pensées

Les amoureux s’expriment fort bien quand ils parlent d’échanger leurs cœurs. La passion enchanteresse de l’amour dénature effectivement le caractère des deux sexes. Elle donne de l’esprit à la bergère, de la douceur au berger ; elle échange enfin entr’eux le courage et la timidité.

Quand le malheur est suspendu sur ma tête, je m’écrie : Dieu, préserve-m’en. Quand il me frappe : Dieu soit loué.

Le courage et la modestie sont les deux vertus les moins équivoques, parce que l’hypocrisie ne sauroit les imiter.

Elles ont encore cette propriété, qu’elles s’annoncent en nous par la même couleur.

Les hommes sont comme les plantes : les unes aiment le soleil, et les autres l’ombre.

Il y a deux sortes d’écrivains moraux : les uns font de l’homme un ange et les autres une bête. Ils ont tous tort : l’un argumente du meilleur, et l’autre du pire des hommes. Le docteur Young les concilie ainsi : « Nous ne pouvons avoir une trop haute idée de notre nature, et une trop basse de nous-mêmes. »

Les rois sont plus malheureux que leurs sujets : l’habitude accoutume au mal-aise, tandis que la fatigue de régner devient chaque