Aller au contenu

Page:Stevenson - L’Île au trésor, trad. Varlet.djvu/232

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
228
L’ÎLE AU TRÉSOR

pâle et plus grave que de coutume. Il portait encore le bel habit de drap sous lequel il avait rempli sa mission, mais cet habit était, par un contraste amer, souillé de glaise et déchiré aux ronces acérées des bois.

— Ainsi donc, fit Silver, voilà Jim Hawkins, mort de mes os ! En visite, on dirait, hé ? Allons, soit, je prends la chose amicalement.

Il s’assit sur le tonnelet d’eau-de-vie, et se bourra une pipe.

— Passe-moi la torche, Dick, reprit-il. Puis, après avoir allumé :

— Ça ira, garçon : tiens, pique cette chandelle dans le tas de bois : et vous, messeigneurs, amenez-vous !… inutile de rester debout pour M. Hawkins : il vous excusera, soyez-en sûrs. Et ainsi, Jim (et il tassa son tabac), te voilà ? La surprise est tout à fait agréable pour ce pauvre vieux John. J’ai bien vu que tu étais sage, dès la première fois que j’ai jeté les yeux sur toi ; mais ceci me passe, en vérité.

À tout cela, comme on peut le croire, je ne répliquai rien. On m’avait placé le dos au mur ; je restais là, regardant Silver dans les yeux, et faisant montre, je l’espère, d’une passable fermeté, mais le cœur plein d’un sombre désespoir.

Silver tira très posément deux ou trois bouffées de sa pipe, et poursuivit ainsi :

— Maintenant, vois-tu, Jim, puisque aussi bien tu es ici, je vais te dire un peu ma façon de penser. Je t’ai toujours estimé comme un garçon d’esprit et comme mon propre portrait lorsque j’étais jeune et de bonne mine. J’ai toujours désiré que tu t’enrôles avec nous, pour recevoir ta part et mourir en gentilhomme. Et maintenant, mon brave, tu vas y venir. Le capitaine Smollett est un bon marin, je