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Page:Stevenson - Le Roman du prince Othon.djvu/159

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DE L’AMOUR ET DE LA POLITIQUE

— Je n’y vois rien, rien que tumulte, répondit-elle.

— Vous y voyez, Madame, un mot, imprimé comme une brûlure, répliqua le baron : « Abdication. »

— Oh ! le lâche ! s’écria-t-elle. Il me laisse tout faire, tout supporter… et au dernier moment il me frappe en traître ! Il n’y a rien en lui, ni respect, ni amour, ni courage. Sa femme, sa dignité, son trône, l’honneur de son père, il oublie tout !

— Oui, poursuivit le baron : Abdication… J’entrevois là une lueur.

— Je lis dans votre esprit, dit-elle. Mais c’est folie pure, baron. Je suis encore plus détestée que lui ; vous le savez vous-même. On sait excuser, aimer même sa faiblesse. Moi, on me hait.

— Telle est la reconnaissance des peuples, dit le baron. Mais nous perdons notre temps. Voici, Madame, ma pensée pure et simple. L’homme qui à l’heure du danger peut parler d’abdication n’est, pour moi, qu’un animal venimeux. Je parle, Madame, avec la franchise que demandent les choses graves : ce n’est pas le moment de parler avec délicatesse. Le poltron, en position d’autorité, est plus à craindre que le feu. Nous sommes sur un volcan : si cet homme demeure libre d’agir à sa guise, avant une semaine Grunewald aura été inondé de sang innocent. Vous reconnaissez la vérité de mes paroles ; nous avons toujours envisagé sans pâlir cette catastrophe toujours possible. Pour lui cela n’est rien… il peut abdiquer ! Abdiquer, juste Dieu ! Et ce malheureux pays confié à sa charge ; et la vie des hommes, et l’honneur des