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Page:Stevenson - Le Roman du prince Othon.djvu/28

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LE ROMAN DU PRINCE OTHON

bientôt place à un ragoût suivi de fromage. Ce ne fut que quand son hôte eut complètement satisfait à sa faim, et que la compagnie se fut rassemblée autour du foyer pour finir la cruche de vin, que la courtoisie méticuleuse de Killian Gottesheim lui permit enfin d’interroger le prince.

— Monsieur vient sans doute de loin ? demanda-t-il.

— Oui, d’assez loin, comme vous dites, répondit Othon ; et, comme vous l’avez vu, bien disposé pour rendre justice à la cuisine de mademoiselle votre fille.

— Du côté de Brandenau, peut-être ?

— Justement. Et même, ajouta le prince, entremêlant, selon l’habitude de tout hâbleur, un fil de vérité dans le tissu de ses mensonges, je pensais dormir à Mittwalden, si je ne m’étais pas fourvoyé.

— Ce sont les affaires qui vous amènent à Mittwalden ? continua l’hôte.

— Non, simple curiosité. Jamais je n’ai vu la principauté de Grunewald.

Le vieux branla la tête, et, de sa voix aiguë :

— Ah ! un bon pays, fit-il. Bon pays, et belle race, tant hommes que sapins ! Nous nous tenons pour à demi grunewaldiens, nous autres, si près de la frontière ; et notre rivière là-bas est toute eau de Grunewald, bonne eau jusqu’à la dernière goutte. Ah ! oui, c’est un beau pays ! Un Grunewaldien, tenez, vous brandit une hache que bien des hommes de Gérolstein peuvent à peine soulever ; et pour ce qui est des sapins, il doit, ma foi, Monsieur, y en avoir plus dans ce petit État, que de gens dans le monde entier. Voilà bien vingt ans que je n’ai