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Page:Stevenson - Le Roman du prince Othon.djvu/79

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DE L’AMOUR ET DE LA POLITIQUE

— Ah bah ! Je voudrais bien savoir dans quel cerveau malade, dit Gotthold, ce monstre inconcevable a vu le jour ?

— C’était quelqu’un de ton propre métier, un écrivain. Un nommé Rœderer, dit Othon.

— Rœderer ! Un oison ! s’écria Gotthold.

— Tu te montres ingrat, dit Othon. C’est un de tes admirateurs jurés.

— Pas possible ? se récria Gotthold, visiblement impressionné. Allons, il doit alors y avoir du bon dans ce jeune homme. Il faudra que je relise son fatras. C’est du reste une bonne note pour lui, car nos vues sont contraires. L’orient et l’occident ne sont pas plus opposés que nos idées. Serait-il possible que je l’aie converti ? Mais non, c’est une aventure de contes de fées.

— Alors, demanda le prince, tu n’es pas partisan du système autoritaire ?

— Moi ? Dieu me protège ! Je suis un rouge, mon fils.

— Cela m’amène, et par une transition naturelle, à mon deuxième point. Étant donné, demanda le prince, que je suis si mal adapté à ma position, que mes amis eux-mêmes l’admettent ; étant donné que mes sujets réclament à hauts cris mon renversement, et qu’une révolution se prépare en ce moment même, ne devrais-je pas aller à la rencontre de l’inévitable, ne devrais-je pas empêcher ces horreurs, et en finir avec ces absurdités ? En un mot, ne serait-il pas convenable d’abdiquer ? Oh ! crois-moi ! Je sens tout le ridicule, l’immense abus de langage, ajouta-t-il avec une grimace expressive ; mais même un princi-