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Page:Stirner - L’Unique et sa propriété.djvu/159

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pas autre chose que la connaissance de la raison appliquée à nos rapports existants. » Son but est un « ordre raisonnable », une « règle morale », une « liberté limitée » ; ce n’est pas l’anarchie, l’absence de loi, le règne de l’individu. Si la raison est souveraine, la personne succombe. Depuis longtemps, l’art, non content de laisser subsister le laid, le considère comme indispensable à sa propre existence et l’adopte : il a besoin du scélérat, du traître, etc. Dans le domaine religieux aussi, les libéraux extrêmes vont si loin qu’ils veulent que le plus religieux des hommes, c’est-à-dire le scélérat religieux, soit considéré comme citoyen d’État. Ils ne veulent plus rien savoir des tribunaux d’hérétiques. Mais contre la loi de raison personne ne doit se révolter, autrement on encourt les plus durs châtiments. On veut que ma raison seule — et non pas ma personne ou les miens — se meuve et se manifeste librement ; c’est-à-dire qu’on veut la souveraineté de la raison, une souveraineté. Les libéraux sont des zélateurs non précisément de la Foi, de Dieu, etc… mais de la raison, leur souveraine. Ils ne supportent aucun manque d’éducation, et ne peuvent, par suite, supporter aucun développement personnel, aucune détermination personnelle : ils exercent une tutelle aussi soucieuse que celle des souverains les plus absolus.

« Liberté politique », qu’est-ce qu’il faut entendre par là ? Sans doute la liberté de l’individu libre de l’État et de ses lois ? Non, au contraire, l’assujettissement de l’individu dans l’État et aux lois de l’État. Mais pourquoi « liberté » ? Parce qu’on n’est plus séparé de l’État par des personnes intermédiaires, mais parce qu’on se trouve en rapport direct et immédiat avec lui, parce qu’on est citoyen de l’État, parce qu’on n’est pas