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Page:Stirner - L’Unique et sa propriété.djvu/168

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demeure soucieusement dans la limite de son droit, de son pouvoir parce que personne ne peut plus qu’il ne peut. Certains disent que la puissance ou l’impuissance individuelle des miens doivent être les seules limites de mon pouvoir, la règle unique qui m’enchaîne. Dois-je accepter cette vue qui renverse tout ? Non, je suis un citoyen qui respecte les lois !

Le régime bourgeois suit une morale en relation étroite avec son essence. La première condition c’est que l’on ait une occupation solide, que l’on exerce une profession honorable, un commerce qui ne porte pas atteinte à la morale. À ce point de vue, le chevalier d’industrie, la fille de joie, le voleur, le bandit, le meurtrier, l’homme sans fortune et sans situation, l’homme léger, sont des gens immoraux. Le bon citoyen en les appelant « immoraux » formule la répulsion profonde qu’ils lui inspirent. Il manque à tous ces gens-là la stabilité, le solide, une vie honnête et bien assise, de bons revenus, etc., bref leur existence ne repose pas sur une base stable, et ils forment la catégorie des individus suspects, ils appartiennent à la classe dangereuse du prolétariat. Ce sont des « turbulents » qui n’offrent aucune garantie, n’ont « rien à perdre », et par conséquent rien à risquer. Par exemple, l’homme en s’engageant dans des liens de famille, s’enchaîne, lié, il offre une garantie, il est saisissable ; la fille de joie au contraire n’en fournit aucune. Le joueur risque tout au jeu, il se ruine lui et les autres ; — aucune garantie. On pourrait comprendre sous le nom de « vagabonds » tous les individus qui paraissent douteux, hostiles et dangereux au citoyen ; le vagabondage en tout genre lui déplaît. Car il y a aussi des vagabonds de l’intelligence qui trouvent la demeure héritée