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Page:Stirner - L’Unique et sa propriété.djvu/171

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nant de l’époque bourgeoise : un noble sans propriété, un travailleur qui ne possède rien sont des « meurt-de-faim » qui ne comptent pas au point de vue politique. La naissance et le travail n’y font rien, c’est l’argent seul qui donne à l’homme sa valeur. Ceux qui possèdent exercent la souveraineté, mais l’État prend parmi ceux qui ne possèdent pas, ses « serviteurs » ; il les élève à son service et leur donne de l’argent (traitement) suivant la part qu’ils prennent à la souveraineté (gouvernement) qu’ils exercent en son nom.

Je reçois tout de l’État. Ai-je quelque chose sans l’assentiment de l’État ? Ce que j’ai sans qu’il y consente, il me le reprend aussitôt qu’il peut découvrir que je n’y ai pas « titre ». Ainsi donc, tout ce que j’ai, n’est-ce pas sa faveur, son consentement qui me le donne ?

C’est là-dessus seulement, sur le titre légal, que s’appuie le régime bourgeois. Le bourgeois est ce qu’il est en raison de la protection, de la faveur de l’État. Il devrait s’attendre à tout perdre du jour où la puissance de l’État serait brisée.

Mais comment en est-il de celui qui n’a rien à perdre, du prolétaire ? Comme il n’a rien à perdre, il n’a pas besoin avec son « rien » de la protection de l’État. Il ne peut au contraire qu’y gagner à ce que la protection de l’État soit enlevée à ses protégés.

Ainsi donc celui qui ne possède pas considère l’État comme la puissance tutélaire du possédant qu’elle comble de privilèges, tandis qu’elle le suce jusqu’à l’épuisement, lui, le non-possédant. L’État, c’est l’État bourgeois, c’est la constitution même de la bourgeoisie. Il protège l’homme non pas suivant son travail, mais suivant son obéissance (« loyalisme »), suivant qu’il exerce les droits qui lui sont conférés par l’État, confor-