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Page:Stirner - L’Unique et sa propriété.djvu/228

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quatrième, nous y gagnons un nouveau maître, « une majorité souveraine » ; délivrez-nous plutôt de l’affreuse inégalité existante. — « Ô lamentable égalité, voilà donc que j’entends encore les hurlements de la plèbe ! Quel beau rêve je faisais, je voyais un paradis de liberté ! Je m’éveille et je n’entends que les clameurs sauvages de l’impudence et de la licence effrénée ! » Ainsi se lamente le premier et il se redresse pour saisir son épée et se ruer sur la « liberté illimitée » . Et bientôt, nous n’entendons plus que le cliquetis des armes des rêveurs de liberté désunis.

De tout temps l’instinct de liberté a abouti au désir d’une liberté déterminée, par exemple, la liberté de la foi, c’est-à-dire que l’homme croyant a voulu être libre et indépendant ; de quoi ? de la foi, peut-être ? — Non, mais des inquisiteurs de la foi ! Aujourd’hui c’est le tour de « la liberté politique et civile » . Le citoyen veut être libre, non du régime bourgeois, mais de la domination des fonctionnaires, de l’arbitrage des princes, etc. Le prince de Metternich disait un jour qu’il avait trouvé une voie qui, en toutes circonstances, conduirait à la vraie liberté. Le comte de Provence s’enfuit de France dans le temps même où l’on s’occupait de fonder « le royaume de la liberté », il disait : « Mon esclavage m’était devenu insupportable, je n’avais qu’une seule passion, le désir de la liberté, je ne pensais qu’à elle. »

Le désir d’une liberté déterminée enferme constamment l’intention d’une nouvelle domination. Ainsi la Révolution put donner à ses défenseurs le sentiment exaltant qu’ils combattaient pour la liberté, mais en réalité on tendait à une liberté déterminée, c’est-à-dire à une nouvelle domination, celle de la Loi.