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Page:Stirner - L’Unique et sa propriété.djvu/397

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sur sa nudité malheureuse. Insensible, le juge sévère arrache au pauvre accusé ses derniers lambeaux d’excuse, le geôlier impitoyable le traîne en sa sombre prison, et, la peine accomplie, rejette le condamné, flétri pour toujours, parmi les hommes qui le méprisent et lui crachent au visage, ces hommes ses frères, ses bons frères, loyaux et chrétiens ! Pas de pitié même pour le criminel « qui a mérité la mort », on le traîne sur l’échafaud et sous les yeux d’une foule délirante, la loi morale satisfaite accomplit solennellement son auguste vengeance. L’un des deux seul doit vivre, la loi morale ou le criminel. Où les criminels vivent dans l’impunité la loi morale a disparu ; où celle-ci domine, c’est eux qui doivent disparaître. Leur hostilité est irréductible.

C’est là précisément l’époque chrétienne, c’est le règne de la pitié, de l’amour, du souci de mettre les hommes en possession des biens qui leur conviennent et même de les amener à remplir leur mission humaine (divine). Ainsi on a posé plus haut : l’essence de l’homme est telle ou telle et par conséquent aussi sa mission ; ou bien c’est Dieu qui la lui a donnée, ou bien (dans la conception actuelle) c’est son état d’homme (l’espèce). D’où le zèle de la propagande. Que les communistes et les humanitaires attendent plus de l’homme que ne font les chrétiens, leur point de vue reste le même. L’humain doit échoir à l’homme. S’il suffisait aux gens pieux que le divin lui fût donné en partage, les humanitaires désirent aujourd’hui que l’homme ne soit pas amoindri en lui. Tous deux se bandent contre l’égoïstique. Naturellement, car l’égoïstique ne peut être accordé ou seulement conféré (comme un fief) à l’homme. Il doit se le procurer. Tandis que