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Page:Stirner - L’Unique et sa propriété.djvu/443

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future ». Conservatisme ou « victoire sur la mort » voilà ce qu’il a au fond du cœur : « le dernier ennemi à vaincre est la mort »[1]. « Christ a ravi à la mort son pouvoir et l’Évangile a fait naître la vie et l’être impérissable »[2]. « Immortalité », stabilité.

L’homme moral veut le Bien, le Juste, et quand il prend les moyens qui mènent à ce but, qui y mènent réellement, ces moyens ne sont pas les siens mais ceux-mêmes du Bien et du Juste. Jamais ces moyens ne sont immoraux parce qu’ils servent d’intermédiaire pour atteindre un objet bon en lui-même. La fin sanctifie les moyens. On dit que ce principe est jésuitique, mais il est absolument « moral ». L’homme moral agit pour servir un but, ou une idée, il se fait l’instrument de l’idée du Bien absolument comme l’homme religieux se glorifie d’être l’instrument de Dieu. Le commandement moral ordonne d’attendre la mort parce que c’est bien ; se la donner est immoral et mal ; le suicide ne trouve pas d’excuse au tribunal de la morale. L’homme religieux le défend parce que « ce n’est pas toi mais Dieu qui t’a donné la vie, et lui seul aussi peut la reprendre » (comme si Dieu ne me la reprenait pas aussi bien quand je me tue que lorsque je meurs tué par une tuile ou un boulet de l’ennemi ; car alors il éveille en moi la résolution de mourir). L’homme moral prohibe le suicide parce que je dois ma vie à ma patrie, etc., parce que « je ne sais pas si je ne pourrais pas encore faire quelque chose de bien dans ma vie ». Et naturellement le Bien perd en moi un instrument comme antérieurement Dieu. Si je suis immoral, mon amélioration sert le Bien, si je suis « impie » Dieu a la

  1. Aux Corinthiens.
  2. Timothée.