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Page:Suarès - Sur la mort de mon frère.djvu/29

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qu’une douleur. Telle est la profonde essence de la douleur dans l’homme, que, s’il était tout homme, il serait tout douleur. C’est son propre : le conflit meurtrier du cœur et de l’esprit l’exige. Guerre inapaisable : elle ne peut que s’étendre, une fois déclarée. Le désespoir a son génie : l’arme savante de la pensée sape la vie de toutes parts et porte le champ de bataille à l’infini. Il faut que le cœur succombe, ou qu’il souffre à l’infini. La pensée ne lui fait rien connaître, qui ne soit contre lui. Le cœur est la vie que la pensée plonge dans la mort.

Tout ce qui était de la joie pour l’instinct, se fait douleur pour le cœur de l’homme. Car le cœur, c’est l’instinct sous la loi de l’amour. Et la pensée lui fait une guerre à mort. Les formes de la vie, les nuages divers de l’illusion flottent sur