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Page:Sue - Les Fils de famille (1856).djvu/116

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qu’il m’inspirait. Je suis épouvanté du parti qu’il peut tirer de cette conversation si perfidement surprise ?

Pendant que Charles Delmare se livrait à ces tristes réflexions, Jeane, à la voix de Maurice, s’étant, nous l’avons dit, avancée jusqu’au seuil de la tonnelle et, tournant ainsi le dos à son père, n’avait pu le voir écarter le feuillage de la charmille et soupçonner ainsi la découverte qu’il venait de faire.

— Jeane, chère Jeane, où es-tu ? — criait de loin et gaiement Maurice en s’approchant. — Mon père demande si le déjeuner est prêt.

— Tout est prêt ; on peut se mettre à table quand on voudra, cher Maurice, — répondit la jeune fille à son fiancé, au moment où il entrait dans le cabinet de verdure.


XX


Maurice entra dans le cabinet de verdure, l’œil brillant, le sourire aux lèvres ; le bonheur donnait à son visage une expression si douce, si attrayante, que Jeane, attendrie, charmée, rassurée, pleine de confiance dans l’heureuse influence de son fiancé, lui tendit les mains avec effusion et jeta un regard significatif à Charles Delmare, en s’écriant, émue, radieuse :

— Ah ! cher maître, j’osais les comparer, pourtant !

— Comparer ! — reprit Maurice conservant dans les siennes les mains de sa cousine et les serrant passionnément. — De quelle comparaison parles-tu, chère Jeane ?

— Oh ! c’est notre secret, à notre cher maître et à moi, — répondit la jeune fille en souriant ; — et, à propos de secret, M. Delmare possède le nôtre, il sait tout, je lui ai annoncé notre mariage.

— Oh ! méchante, tu m’as prévenu ; de quel plaisir tu m’as privé !

Puis Maurice, s’adressant à Charles Delmare :

— Ah ! bon et cher maître, j’ai le ciel dans le cœur, tout resplendit, tout rayonne autour de moi ! Le temps eût été nuageux ce matin, qu’il m’aurait paru éblouissant de soleil. Vous me féli-