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Page:Sue - Les Mystères du peuple, tome 11.djvu/215

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nombreuses, mais dans ces provinces wallonnes, devenues françaises, en stipulant de solides garanties pour leurs libertés, ou dans les Pays-Bas républicainement confédérés, à l’imitation des cantons suisses, sous le protectorat de M. le prince de Nassau. Je suis attaché, par tradition de famille et par principe, au gouvernement monarchique ; mais, je le sais, beaucoup de nos frères, et vous êtes de ce nombre, révoltés des crimes de la maison régnante, inclinent fortement vers la république. À ceux-ci, la fédération des Pays-Bas, si elle s’établit, offrira une forme de gouvernement selon leurs vœux. » — Mais, monsieur l’amiral, lui dis-je, si nos soupçons se réalisent ? si l’appui que vous promettent depuis si longtemps le roi et sa mère, au sujet du soulèvement des Pays-Bas, est un leurre et cache un piége ? « — Je ne le pense pas, me répondit M. de Coligny ; mais cela peut être… Il faut s’attendre à tout de la part de Catherine de Médicis et de son fils… » — Eh quoi ! monsieur l’amiral, m’écriai-je, malgré cette possibilité, vous restez à la cour, parmi vos ennemis mortels ? vous ne cherchez pas à vous mettre en garde contre une trahison probable ? « — Mon ami, reprit M. de Coligny avec une gravité mélancolique, pendant de longues années, j’ai fait de toutes les guerres la plus horrible de toutes… la guerre civile… Elle m’inspire une aversion insurmontable… Le soulèvement des Flandres et des Pays-Bas, s’il s’accomplit, m’offre le moyen d’arrêter l’effusion du sang français et d’assurer une nouvelle et libre patrie à nos frères ; or, de deux choses l’une : ou les promesses du roi sont sincères, ou elles ne le sont pas. Si elles le sont, je regarderais comme un crime de ruiner par mon impatience ou par mes défiances la réussite d’un dessein si favorable à l’avenir des protestants. » — Et si le roi n’est pas sincère, monsieur l’amiral, lui dis-je ; si ses promesses n’ont d’autre but que de gagner du temps, afin d’assurer le succès d’une nouvelle et effroyable trahison ? « — En ce cas, mon ami, je serai victime de la trahison, » reprit tranquillement M. de Coligny. Est-ce à ma vie que l’on en