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Page:Sue - Les Mystères du peuple, tome 11.djvu/76

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de Rome et surtout de l’Espagne, l’ennemi séculaire de la France, les catholiques m’inspiraient… je vous ai promis d’être franche… m’inspiraient, dis-je, un profond mépris…

— Ah ! madame… de telles paroles…

— Voyons, au fond, au vrai, mon révérend, de quoi se compose-t-il ce parti catholique ? d’une populace stupide, fanatique féroce, complètement à la discrétion des moines, avides, fainéants, ignares, crasseux et dissolus. Parlerai-je des chefs laïques ou ecclésiastiques ? Quelles sont leurs mœurs ?… J’en rougirais… si elles n’étaient les miennes ! De quoi vivent-ils ? Des nombreux bénéfices et des mille abus de l’Église. Qu’ajoutent ces gens-là aux ressources publiques ? Rien ! cupides et oisifs, inutiles et prodigues, ils rongent, ils épuisent, ils appauvrissent le pays ; tandis qu’au contraire les reformés, laborieux, actifs, austères, économes, doués du génie du commerce, enrichissaient l’État avant les guerres civiles.

— Je comptais, madame, sur votre franchise… Elle dépasse mes espérances… elle me confond, m’épouvante, et cette apologie des hérétiques…

— Mon révérend, croyez-vous Catherine de Médicis assez neuve aux affaires pour volontairement fournir des armes contre elle ?

— Quoi ! madame… ces aveux…

— … Plaideront tout à l’heure très-fort en ma faveur… Ainsi ne vous étonnez pas si j’ajoute qu’afin de prouver aux réformés combien j’inclinais vers eux, je leur ai fait savoir en ce temps-là que mon fils Charles, encore enfant, s’amusait, dans ses jeux, à travestir en mascarade les cérémonies de l’Église catholique. Gardez-vous de crier au sacrilège, mon révérend : n’ayant point, je vous le répète, de religion, j’agissais uniquement en politique. Enfin, grâce à mon appui, les protestants respiraient, espéraient ; la présence de L’Hôpital au conseil royal les rassurait ; l’on n’outrageait pas partout leur culte ; on les brûlait plus rarement ; on les massacrait un peu moins, ils se croyaient au seuil de Chanaan, leur terre de promission ; les