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Page:Sue - Les Mystères du peuple, tome 13.djvu/239

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mains à son visage, et en cet instant éclatent au dehors et de nouveau ces cris :

— Vive la nation ! — À mort les ennemis du peuple ! — À la lanterne les aristocrates ! — À la lanterne Desmarais ! — C’est un faux frère ! — À mort le traître !

Ces clameurs menaçantes semblaient, par une étrange coïncidence, répondre, si à propos à ces dernières paroles adressées par Charlotte à son père : — « Ce peuple… vous le méprisez… vous le redoutez… vous le haïssez. » — que la jeune fille frissonne d’effroi, tandis que sa mère, saisie d’épouvante, se jette éperdue à genoux sur le parquet dans l’attitude de la prière, joint les mains et balbutie d’une voix implorante :

— Seigneur, mon Dieu… ayez pitié de nous… Quelques bruits auront soudain circulé sur les opinions secrètes de mon mari… le voici exposé à la fureur du peuple… naguère si bienveillant… Sauvez-nous… mon Dieu… ayez pitié de nous !

— À la lanterne Desmarais ! — C’est un faux frère ! — À mort le traître ! — Hurle encore la bande de Lehiron en poursuivant sa marche… alors que, sortant de sa stupeur, reprenant quelque courage en entendant les cris de mort se perdre dans le lointain, mais ne pouvant comprendre le revirement étrange qui lui semble s’être brusquement opéré dans les sentiments du peuple à son égard, M. Desmarais, foudroyant Charlotte du regard et du geste, s’écrie d’une voix terrible :

— Fille dénaturée ! fille parricide ! Vous les avez entendus, ces cris meurtriers vociférés contre votre père… par ces cannibales qui portent en trophée la tête de Flesselles… Vous les avez entendus, ces cris… Et qui les pousse ?… ce peuple féroce dont votre amant Jean Lebrenn est l’un des chefs assassins !


Pendant que l’avocat Desmarais accablait ainsi Charlotte de ses