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Page:Sue - Les Mystères du peuple, tome 13.djvu/245

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— Pourquoi t’interrompre ? tu ne me réponds rien… tu détournes la vue… Jean… mon enfant… mon cher enfant ! — ajoute madame Lebrenn s’élançant vers son fils et le forçant de retourner la tête vers elle. — Que vois-je… tu pleures !… plus de doute, Seigneur Dieu ! ce vieillard… c’était… c’était… — Elle ne peut achever, la parole expire sur ses lèvres blanchies, elle, est près de s’évanouir. Jean, agenouillé devant elle, la soutient dans ses bras, lui disant :

— Bonne mère… du courage ! !

— Du courage ?… — répète madame Lebrenn, tressaillant et rappelée à elle même par de nouvelles appréhensions, — du courage… dis-tu ?… mais… tu me trompes donc ? Ce n’était donc pas… ton père ?…

— Si… je te le jure… c’était bien lui… je l’ai revu… je l’ai serré dans mes bras…

— Grand Dieu !… il n’aura pas survécu… à sa liberté, au bonheur de te revoir ! !

— Rassure-toi… il vit… tu le reverras bientôt… Mais… pauvre chère mère… je te le répète… du courage…

— Mais puisqu’il vit !

— Hélas !… tu oublies que dans son cachot… mon père… a perdu la vue…

— Qu’est-ce que cela me fait à moi… qu’il soit aveugle… il vit… Dieu du ciel ! il vit !

— Ce n’est pas tout… le poids de ses fers… l’humidité glaciale de ce cachot, ont perclus, paralysé les membres de mon père… il peut à peine se traîner…

— Mais il vit ! !… qu’importe qu’il soit aveugle et perclus ! Nous guiderons ses pas ! !… nous le porterons… nous le guérirons ! ! Ses infirmités nous le rendront plus cher encore ! — s’écrie madame Lebrenn dans une exaltation fiévreuse et se levant soudain ; puisant dans sa tendresse une énergie factice, elle se dirige rapidement vers