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Page:Sue - Les Mystères du peuple, tome 8.djvu/13

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du Beauvoisis sur le droit de déflorement des vassales par leur seigneur. — Le tournoi. — La belle Gloriande, fiancée du sire de Nointel. — Le duel judiciaire. — Combat de Jacques Bonhomme, désarmé, contre un chevalier armé de toutes piéces. — Le messager du roi Jean. — Lâcheté de la noblesse. — Les cinq pendus. — Le revenant. — Mahiet-l’Avocat retourne à Paris.




Moi, Mahiet-l’Avocat d’armes, fils de Mazurek-le-Brenn, le libraire, qui eut pour père Julyan, pour grand-père Kervelaïk, et pour bisaïeul Mylio-le-Trouvère ; j’ai, aujourd’hui, cent ans passés ; je suis centenaire comme l’a été notre ancêtre Amaël, qui vit s’éteindre le dernier rejeton de Clovis et fut témoin de la splendeur éphémère du règne de Charlemagne ; les récits suivants, qui embrassent presque un siècle (de 1356 à 1432), ont été, à de longues années d’intervalle, écrits par moi. Je les fais précéder de ces lignes que j’ajoute aujourd’hui à cette légende, parce que les événements dont je viens d’être spectateur à la fin de ma vie centenaire (en cette année 1432) forment pour ainsi dire le complément des faits qui vont, fils de Joel, se dérouler devant vous à dater de 1356. — Deux mots vous diront ma pensée. En 1356, la criminelle impéritie d’un roi cupide et prodigue, cruel et débauché, la lâcheté de la noblesse française, ont livré presque entièrement la Gaule aux Anglais, et après soixante et quinze années de ravages, de désastres, de misères, de hontes, d’ignominies, dont la noblesse et la royauté sont seules coupables et responsables, une fille du peuple vient de sauver, en cette année 1432, la Gaule de sa ruine et de chasser enfin l’étranger de notre sol ; et pourtant, le croiriez-vous ? cette héroïne plébéienne, cette digne fille des viriles Gauloises des temps antiques, a été brûlée, il y a peu de jours, par les prêtres catholiques ; et grande a été la joie féroce d’une foule de courtisans et d’officiers jaloux de la gloire roturière de la fille du peuple ! Elle a sauvé la Gaule, et le roi lâche, ingrat et corrompu, qu’elle a rétabli sur son trône, l’a laissé supplicier ! Ô Jeanne ! pauvre bergère de Domrémi ! Ô Jeanne ! pauvre vassale, ta race as-