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Page:Sue - Les Mystères du peuple, tome 8.djvu/292

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d’un premier accès de folie. Cet accès dure un mois environ ; mais l’année suivante, vers le commencement de juillet, chevauchant avec sa suite et son frère le duc d’Orléans, sur la route du Mans, Charles VI, soudain en proie à une folie furieuse, se précipite sur ses écuyers, les frappe à coups d’épée, blesse plusieurs d’entre eux et est sur le point de tuer son frère. À cette frénésie succède un profond accablement ; l’on en profite pour garrotter le sire, dont la raison resta complétement égarée pendant un an. Le duc de Bourgogne s’empare de la régence du royaume, au détriment du duc d’Orléans, frère de Charles VI ; le d’Orléans se dédommage en subornant sa belle-sœur, la reine Isabeau de Bavière, qui profite de la folie de son mari pour se livrer à ses déportements. Au bout d’une année, Charles VI retrouve sa raison, se plonge dans de nouveaux excès : ce ne sont, à l’hôtel de Saint-Pol, que fêtes, danses, festins, tournois, mascarades, où les courtisans paradaient déguisés sous des peaux de bêtes figurant des loups, des ours, des lions. Pendant que le roi se divertissait de ces saturnales, le duc de Bourgogne conservait prudemment le maniement des affaires publiques ; au mois de juin 1393, Charles VI retombe dans son insanité d’esprit. Cependant, il retrouve sa raison pendant quelques mois en 1391 ; mais bientôt il la reperd ; et depuis lors, jusqu’à la fin de sa trop longue vie, sa folie fut constante, sauf quelques rares intermittences de lucidité. Jamais la Gaule n’avait connu de plus horribles jours : partout la guerre civile et étrangère ; les finances pillées tour à tour par le duc d’Orléans ou par le duc de Bourgogne, selon qu’ils s’imposaient à Charles VI lors de ses éphémères retours à la raison. Philippe-le-Hardi, duc de Bourgogne, meurt en 1404 ; le duc d’Orléans, amant de la reine Isabeau, lui succède au pouvoir ; mais, en 1408, il est assassiné par ordre du duc de Bourgogne. Ce meurtre donne le signal d’une nouvelle guerre civile acharnée ; l’héritier du duc de Bourgogne, après l’assassinat du duc d’Orléans, qui laissait un fils, s’empare du gouvernement, de complicité avec la reine Isabeau de Bavière, dont il devient à son tour