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Page:Sue - Les Mystères du peuple, tome 9.djvu/237

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machination diabolique : — « Feindre de la compassion pour Jeanne Darc, afin de capter sa confiance et de lui dicter des réponses qui pouvaient la perdre ! » — Cette exécrable trame n’a été que trop habilement ourdie. Citons encore :

Guillaume Collet dépose : « — Que maître Nicolas Loyseleur, feignant d’être prisonnier et du parti du roi de France, entra souvent dans le cachot de Jeanne, l’engageant à ne pas croire aux gens d’Église qui l’interrogeaient, et à se défier d’eux, parce que, si elle s’y fiait, elle serait perdue… L’évêque de Beauvais autorisait la conduite de maître Nicolas Loyseleur, sans quoi celui-ci n’eût pas ainsi agi de lui-même. » (T. III, p. 162.)

Nicolas de Houppeville dépose : — « Que souvent des hommes feignant d’appartenir au parti royaliste furent secrètement introduits auprès de Jeanne, afin de la persuader de ne pas se soumettre à l’Église… Maître Nicolas Loyseleur était l’un de ces séducteurs (seductoribus). » (T. III, p. 173.)

Enfin la victime est condamnée ! Les capitaines anglais, non moins impatients de son supplice que le clergé, attendaient la sentence au dehors de l’enceinte du tribunal ; l’évêque Pierre Cauchon sort radieux, triomphant, et se frottant les mains, il dit joyeusement aux Anglais en parlant leur langage : — « Farewell… c’est fini… faites bonne chère !… » (T. III., 5.)

Et maintenant, chers lecteurs, si épouvantable que vous paraîtra, que sera la procédure de ce tribunal ecclésiastique, ce tribunal de perfidie, de vengeance, de scélératesse, de ténèbres et de sang… souvenez-vous, nous vous le répétons, souvenez-vous qu’il n’est pas un seul mot qui n’ait été prononcé par Jeanne Darc ou ses bourreaux ! 



Eugène Süe.
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Annecy-le-Vieux (Savoie), 29 octobre 1853.