Aller au contenu

Page:Sue - Les Mystères du peuple, tome 9.djvu/274

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

première enfance ; est-il au monde une vie plus pure, plus glorieuse, plus sainte ?

La guerrière, en défendant le sol sacré de la patrie, a égalé les plus illustres capitaine !

La chrétienne, au fort des batailles, reculant devant l’effusion du sang, a vaillamment versé le sien, mais a laissé son épée au fourreau, guidant ses soldats son étendard à la main. Chaque jour elle s’agenouillait pieusement dans le temple, afin d’y recevoir avec foi et ferveur le pain des anges !… Vous avez lu ses lettres écrites aux capitaines étrangers ou aux chefs des factions civiles. Elle commençait toujours, au nom d’un Dieu de charité, de concorde et de justice, par adjurer les Anglais d’abandonner un pays qu’ils possédaient contre tout droit, qu’ils dominaient par la violence, leur promettant merci et paix s’ils renonçaient à une conquête rendue plus odieuse encore par la rapine et le massacre. S’adressait-elle aux Français armés contre les Français, elle leur rappelait qu’ils étaient de France, les adjurant de se rallier contre l’ennemi commun.

Enfin, Jeanne Darc, comme femme, n’a-t-elle pas donné l’exemple des plus généreuses, des plus angéliques vertus ? sa pudeur ne lui a-t-elle pas inspiré des paroles sublimes, qui seront l’admiration des siècles ?

Comment donc ces prêtres-juges ont-ils pu formuler contre la guerrière, contre la chrétienne, contre la vierge irréprochable, une seule accusation, non pas légitime… autant reconnaître, en se voilant la face avec horreur, que la vertu est le crime… mais une accusation qui ne révolte pas le plus vulgaire bon sens, la plus simple honnêteté ? une accusation qui ne soit pas un sanglant outrage, une insulte dérisoire, un défi sacrilège, jetés à tout ce qui a été, est et sera l’objet de la vénération des hommes ?

Oui, comment ont-ils donc fait, ces prêtres ?

Comment ont-ils fait ? Ah ! fils de Joel, cela est épouvantable à dire… ils ont simplement feuilleté le recueil des canons de l’Église,