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Page:Sue - Les Mystères du peuple, tome 9.djvu/297

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— Tu abusais les pauvres gens, misérable hypocrite !

— Et moi qui la plaignais !

— Ah ! l’Église est trop indulgente !

— Recevoir à la pénitence une si infâme trompeuse !

— Ma foi, mes compères, elle est bien capable d’être endiablée, ainsi que le disent les Anglais !

— Enfin, elle n’en a pas moins remporté de grandes victoires pour la France !

— Par pure sorcellerie ! Ah çà ! vous allez peut-être la plaindre, maintenant, cette horrible menteuse ?

— Hum !… la peur du fagot fait avouer bien des choses !

— Alors, elle est donc lâche ? elle n’a donc pas le courage de soutenir la vérité en face de la mort ? cette poltronne dont on vantait si haut la vaillance ?

Le silence se rétablit peu à peu. Jeanne Darc a entendu les terribles accusations lancées contre elle ; mais le courage l’abandonne. Revenir sur ce premier aveu, c’est convenir qu’elle a cédé à la peur ; son esprit affaibli se trouble de plus en plus, elle cède à la fatalité qui l’entraîne.


l’évêque cauchon, continuant de lire à la pénitente la formule d’abjuration. — « Secondement, moi, Jeanne, je confesse avoir grièvement péché en séduisant les créatures par de superstitieuses divinations, en blasphémant Dieu, ses anges, ses saintes, en méprisant la loi divine, l’Écriture sacrée, ainsi que les droits canons. » (S’adressant à Jeanne.) Le confesses-tu ?

jeanne darc. — Je le confesse !

une voix, dans la foule. — Si Jeanne a méprisé vos divins canons, elle s’est bravement servie des canons français !… Prêtres, vous êtes des monstres !…

Des huées, des imprécations, surtout sorties des rangs des soldats anglais, couvrent la voix du partisan de l’héroïne, et le silence se rétablit.