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Page:Sue - Les misères des enfants trouvés III (1850).djvu/295

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ménagea cette rencontre dans la maison d’une paysanne chez qui Claude Gérard avait placé l’enfant ; en effet, quoique la pauvre mère ne parût pas reconnaître sa fille, elle ressentit à son aspect un grand attendrissement, pleura beaucoup en la tenant embrassée… puis à ces larmes succéda une sorte d’abattement pensif, à travers lequel le médecin crut voir poindre quelques lueurs de raison ; satisfait de cette première expérience, il se promit de la renouveler.

Ce fut lors de cette seconde entrevue de la folle et de sa fille, entrevue qui se passa dans le petit jardin de la nourrice, que Bamboche sans doute aux aguets et profitant d’un moment où la malheureuse mère était restée seule avec sa petite fille, enleva celle-ci, et, chose inexplicable, déroba aussi le coffret à dentelles que la folle portait constamment avec elle.

Ensuite de quels événements Bamboche se trouvait-il dans ce pays ?

Comment avait-il acquis la certitude que cette enfant était la sienne ?

Dans quel but avait-il dérobé ce coffret, objet de nulle valeur ?

Je ne pus rien savoir sur toutes ces questions, car les recherches de Claude à ce sujet avaient été vaines, et lors de la scène du vol chez le docteur Clément, Bamboche ne m’avait donné aucun détail ; et enfin, la veille du jour où j’étais allé rejoindre Claude Gérard, Bamboche m’avait écrit qu’il n’avait besoin de rien, ni pour lui ni pour sa fille, qu’un hasard heureux était venu à son secours, qu’il s’éloignait, content de m’avoir prouvé que lui aussi savait être fidèle aux serments de notre enfance.

Claude Gérard et moi, cruellement affligés de savoir cette pauvre enfant aux mains de Bamboche, nous nous promîmes de tout tenter chacun de notre côté, afin d’en avoir quelques nouvelles.

J’eus, au sujet de Régina, de longs et graves entretiens avec Claude Gérard ; je ne lui cachai rien : ni la part que j’avais prise à la ruine des méchants desseins de Robert de Mareuil, ni comment j’avais découvert la bizarre dépravation du prince de Montbar, ni cette menace du comte Duriveau : Cette femme m’a dédaigné ; à tout prix je me vengerai ; ma vengeance marche… menace effrayante de la part d’un