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Page:Sue - Les misères des enfants trouvés IV (1850).djvu/265

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Astarté : à peine Martin eut-il lu cette lettre, qu’il devint pâle comme un mort, et s’écria d’une voix déchirante :

— Ah ! ce serait affreux !!

Puis il disparut.

En un instant il fut hors de la maison.

Voici ce que Basquine écrivait à Martin :

« Viens à l’instant rue du Marché-Vieux… Bamboche et moi nous t’y attendons…

« Nous allons être tous trois vengés…

« Bamboche, de Scipion… le bourreau de sa fille Bruyère.

« Toi… du comte Duriveau, le bourreau de ta mère…

« Moi, de Scipion et de son père, race infâme, que moi… fille du peuple, j’ai juré de poursuivre jusqu’à la mort. »

Martin, remontant éperdu dans le cabriolet de place qui l’avait amené, se fit conduire à toute bride rue du Marché-Vieux.

Avant de suivre Martin dans sa course éperdue, disons que Basquine, en sortant de chez elle pour monter dans le fiacre qui l’attendait, s’était d’abord rendue chez la mère de Raphaële ; là, elle avait fait demander par le cocher si Madame Wilson ne venait pas de sortir avec M. le vicomte Scipion. Une réponse affirmative ayant été donnée, Basquine s’était fait conduire chez le comte Duriveau ; et, bien certaine qu’il serait chez lui, attendant son fils, elle avait fait remettre par le cocher une lettre écrite d’avance, et qui devait être à l’instant même portée au comte.

Cette lettre était ainsi conçue :

« Allez chez Madame Wilson, vous apprendrez que Scipion vient de sortir avec elle… Abusant de sa confiance, il la conduit rue du Marché-Vieux, pour se venger de vous

« Souvenez-vous de la princesse de Montbar, et devinez le reste…

« Tel père, tel fils. »

Puis, cette lettre confiée au concierge de l’hôtel du comte, Basquine avait ordonné à son cocher de la mener rapidement rue du Marché-Vieux, pendant que Martin s’y rendait de son côté en toute hâte.

En parcourant ce même chemin que, plusieurs années auparavant, il avait suivi, amenant un vengeur à Madame de Montbar, attirée dans un piège odieux, tendu par M. Duriveau, Martin se voyait sous l’obsession d’un rêve pénible. Par quelle fatalité, se demandait-il, cette même maison, et sans doute le même appartement qui avait