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Page:Sue - Les misères des enfants trouvés I (1850).djvu/12

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Après un moment de réflexion, le sous-officier s’écria :

— Mon évadé doit être là-dedans plutôt qu’ailleurs. Ce matin, au point du jour, un bûcheron a vu s’enfoncer dans le taillis un particulier en guenilles dont le signalement se rapporte à celui de mon brigand ; et comme mon brigand n’osera pas filer du bois pendant le jour, je suis aussi sûr de le pincer que vous êtes sûr de pincer votre renard, père Latrace.

— Mais alors ! monsieur Beaucadet, qu’attendez-vous donc pour vous mettre en quête ?

— J’attends un de mes hommes qui doit venir m’annoncer le commencement de la battue ; alors mon brigand sera cerné de trois côtés… et on le rabattra sur la lisière de ce bois que moi et mes gendarmes nous allons garder.

— Mais depuis quand donc y a-t-il un brigand dans le pays ?

— Vous n’êtes pas allé à Salbris depuis deux jours ?

— Non…

— Alors vous n’avez pas lu le signalement de mon scélérat, affiché à la porte de la mairie ?

— Non, monsieur Beaucadet.

— Je vais vous le lire. Si vous le rencontrez, vous pourrez tomber sur lui, avec l’aide de vos valets de chiens. Écoutez bien, père Latrace, et aussi vous autres, — ajouta M. Beaucadet en s’adressant aux valets de chiens, qui se rapprochèrent.

Le sous-officier, tirant un papier de l’une de ses fontes, lut ce qui suit :

« Signalement du nommé Bamboche. »

— Un drôle de nom tout de même, — dit Latrace.

— On ne lui en connaît pas un plus propre ; la justice est obligée de se dégrader jusqu’à prononcer celui-là, — dit M. Beaucadet, et il continua :

« Ce prisonnier, dont on ignore le véritable nom et les antécédents, est parvenu, dans la nuit du 12 au 13 octobre, à s’évader de la prison de Bourges, où il était écroué comme prévenu d’un double meurtre ; tout porte à croire qu’après avoir trouvé un refuge dans la forêt de Romorantin, où il a failli être arrêté, il a gagné les bois et les landes désertes qui s’étendent dans les environs de Vierzon, de Salbris et de Laferté-Saint-Aubin.

» Ce prévenu, d’une force athlétique, d’une audace extraordinaire, est âgé de trente ans environ. Taille : cinq pieds sept pouces deux