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Page:Sue - Mathilde, tome 6.djvu/8

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pensée, j’y marchai avec une effrayante rapidité : je ne pouvais concevoir mon aveuglement passé.

Je m’expliquai certaines bizarreries de la conduite et des paroles d’Emma. Mille ressouvenirs me frappèrent alors… ainsi, entre autres, elle éprouvait une émotion pénible en voyant tomber de la neige… et la neige avait failli servir de linceul à M. de Rochegune.

Enfin, dernière preuve, fatale preuve ! depuis quelque temps n’éprouvait-elle pas, à son insu sans doute, un vif sentiment de jalousie contre moi ?

Ce premier mouvement de répulsion que je lui inspirais, auquel Emma cédait d’abord en rougissant, puis qu’elle surmontait ensuite, ne démontrait-il pas la force de son amour ?

Et d’ailleurs cet amour n’était-il pas probable, inévitable ?… cette enfant voyant chaque jour un homme tel que M. de Rochegune, n’entendant que ses louanges pouvait-elle s’empêcher de l’aimer ?

Un moment j’accusai amèrement madame de Richeville d’imprudence… Pauvre malheureuse mère !…