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Page:Surell - Étude sur les torrents des Hautes-Alpes, 1841.djvu/122

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On est beaucoup moins embarrassé dans la détermination du débouché, lorsqu’on a à remplacer un ancien pont par un pont nouveau. On peut alors recueillir des observations assez exactes sur la hauteur des eaux. S’il est arrivé, par exemple, que le tablier de ce pont ait été souvent emporté ou surmonté par les eaux, on est assuré que ce tablier est trop bas. L’on se trouve ainsi maître d’une excellente donnée pour l’établissement d’un pont définitif. — Peut-être serait-il utile, dans beaucoup de cas où le succès de l’établissement est douteux, d’ériger cette marche en principe, d’élever d’abord un pont en charpente qui sera peu coûteux, d’observer pendant quelques années la conduite du torrent ; enfin, de ne hasarder un pont définitif que lorsqu’on aura été préalablement instruit par cette sorte de tâtonnement.

Ces ponts définitifs doivent être construits avec une extrême solidité. Il est bon de faire en pierre de taille tous les revêtements susceptibles d’être mouillés par les eaux, ou atteints par les projections des blocs, et il faut donner à ces pierres une forte queue. L’expérience a prouvé que les revêtements en moellons étaient souvent rongés et arrachés[1]. — Il faut avoir le soin de ne laisser aucune arête saillante dans les appareils extérieurs : elle serait bientôt détruite par le choc des pierres. Ainsi, on arrondira l’arête extérieure du socle, ordinairement rectangulaire ; le dé des murs en aile, au lieu d’être cubique, formera un retour courbe ; l’arête même de la voûte sera épannelée sur 0,10 m de chaque côté. Les assises du socle seront cramponnées, etc., etc.[2].

C’est le radier surtout qu’il importe de fortifier. Les radiers périssent presque toujours par l’affouillement qui se fait à leur aval. Il faut jeter là, et jusqu’à une assez grande distance du mur de chute, des gros blocs, contenus par quelques pieux battus. On peut aussi enchaîner les blocs les uns aux autres par des anneaux en fer[2]. — C’est une faute de faire le radier de niveau : si d’un côté on diminue par là la pente sous l’arche, on forme de l’autre côté une chute à l’aval, et de plus, le pont est exposé à être obstrué par les alluvions des eaux ordinaires. Il est préférable de faire suivre au radier la pente naturelle du lit. Il est bon aussi de le faire très-concave, afin que les eaux, à mesure qu’elles diminuent de vo-

  1. Aux ponts de Chaumatéron, — de Bramafam.
  2. a et b Pont du Rabioux.