Aller au contenu

Page:Surell - Étude sur les torrents des Hautes-Alpes, 1841.djvu/39

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Le goulot s’évase vers le haut, à l’endroit où il pénètre dans l’entonnoir.

Celui-ci est figuré, quelquefois, par un col décharné, qui se dresse en amphithéâtre devant l’embouchure du goulot. D’autres fois, le col forme une montagne pastorale[1], sillonnée par une infinité de courants, qui s’y étalent, en imitant une patte d’oie[2]. Ces vastes dépressions étant situées dans les parties les plus hautes des montagnes, l’eau, pendant la plus grande partie de l’année, n’y peut tomber, qu’à l’état de neige. Sous cette forme, elle ne se dissipe pas, ou se dissipe peu : elle se conserve donc, elle s’amoncelle, et si les chaleurs du printemps arrivent sans préparation, elles fondent en peu de jours la masse d’eau, accumulée pendant de longs mois. Ainsi s’explique une des causes principales de la violence de certaines crues.

On peut citer le torrent qui découle du col Izoard, vers Arvieux, comme offrant le type le plus complet du goulot d’un bassin de réception. L’aspect de ce monstrueux torrent est effrayant. Plus de soixante torrents, sur une longueur de moins de 3 000 mètres, précipitent dans le fond de la gorge les débris arrachés aux deux flancs de la montagne. Le moindre de ces torrents secondaires, transporté dans une vallée fertile, suffirait à la ruiner[3].

Dans les torrents du deuxième genre, le bassin de réception, au lieu d’être taillé dans les cols des montagnes, est formé par une ondulation de leurs cimes, et creusé dans leurs revers. C’est dans ce genre qu’il est le plus facile d’observer cette disposition en entonnoir, si caractéristique : ici l’œil peut embrasser, du même coup, le cours entier du torrent, dont toutes les parties se dessinent à la fois devant lui[4].

Enfin, dans le troisième genre, le bassin de réception se réduit à une espèce de large fondrière, creusée par quelques ravins, et qui porte souvent dans le pays le nom de combe[5]. Elle ne reçoit pas d’affluents, et

  1. On appelle ainsi les montagnes réservées aux troupeaux.
  2. Torrents de Rabioux, de Mauriand, comme types ; torrent du Bachelard, aboutissant au col d’Allos (dans les Basses-Alpes).
  3. Voyez la note 4.
  4. Le torrent de Merdanel (à Saint-Crépin) comme type.
  5. Combes de Puy-Sanières, combes de Saint-Sauveur, torrent de Combe-Barre, torrent de Combe-la-Bouze, torrent de Comboye.