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Page:Taine - Les Origines de la France contemporaine, t. 11, 1904.djvu/136

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L’ÉGLISE

C’est une école à part, un internat de jeunes garçons choisis, une serre close, destinée à préserver et développer les vocations ; avant 1789, il n’y en avait pas ; à présent, on en compte 86 en France, et les élèves y sont tous de futurs clercs. Dans cette pépinière préalable, on n’admet pas de plants étrangers, de futurs laïques[1] ; car, expérience faite, si le petit séminaire est mixte, il n’atteint plus son objet ecclésiastique, « il ne déverse habituellement dans le grand séminaire que la queue des classes ; la tête s’en va chercher fortune ailleurs » ; au contraire, « dans les petits séminaires purs, il arrive généralement que la rhétorique, entière passe au grand séminaire : alors on n’a pas seulement la queue, mais la tête de la classe » — Dans cette seconde serre, la culture, qui se prolonge pendant cinq ans, devient intense, tout à fait spéciale ; elle l’était bien moins sous l’ancien régime, même à Saint-Sulpice ; le vitrage avait des fentes et laissait entrer des courants d’air ; les neveux d’archevêque, les cadets nobles prédestinés aux dignités de l’Église y avaient introduit le

  1. L’abbé Bougaud, le Grand Péril, etc., 135 (Opinion de l’archevêque d’Aix). — Ib., 138. « Je sais un petit séminaire où tel cours comptait en quatrième 44 élèves et qui n’a fourni que 4 prêtres ; 40 sont restés en route… On m’a cité un grand collège de Paris, dirigé par des prêtres, renfermant 400 élèves, et d’où, en dix ans, il est sorti une seule vocation ecclésiastique. » — Moniteur du 14 mars 1865 (Discours au sénat par le cardinal de Bonnechose). « Chez nous, la discipline s’établit, dès le jeune âge, au petit séminaire, puis au grand… D’autres nations nous envient nos séminaires ; elles n’ont pas pu en constituer de semblables ; elles ne peuvent pas conserver les jeunes gens si longtemps ; leurs élèves ne viennent dans leurs séminaires que comme externes. »


  le régime moderne, III.
T. XI. — 8