Aller au contenu

Page:Taine - Les Origines de la France contemporaine, t. 11, 1904.djvu/185

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
 Les corrections sont expliquées en page de discussion
162
LE RÉGIME MODERNE


astreints par une obligation stricte et à tout le moins une fois l’an.

Par cet office, le prêtre catholique monte au-dessus de la condition humaine et à une hauteur incommensurable ; car, au confessionnal, il exerce le pouvoir suprême, celui que Dieu exercera au jugement dernier, le formidable pouvoir de retenir ou de remettre les péchés, de condamner ou d’absoudre et, s’il intervient au lit de mort, la faculté d’envoyer l’âme impénitente ou repentante dans l’éternité des récompenses ou dans l’éternité des châtiments[1]. Aucune créature, terrestre ou céleste, non pas même les premiers des archanges, saint Joseph ou la Vierge[2], n’a cette prérogative véritablement divine. Seul il la possède, par une délégation exclusive, en vertu d’un sacrement spécial, l’ordre, qui lui donne le privilège d’en conférer cinq autres et qui le marque pour toute sa vie d’un caractère à part, ineffaçable, surnaturel. — Pour s’en rendre digne, il a fait vœu de chasteté, il entreprend d’abolir dans sa chair et dans son cœur

  1. Manrèze du prêtre, par le R. P. Caussette, I, 37. « Voyez-vous ce jeune homme de vingt-cinq ans, qui va bientôt traverser le sanctuaire pour aller trouver des pécheurs qui l’attendent ? C’est le Dieu de cette terre qui la purifie… Si Jésus-Christ descendait dans un confessionnal, il dirait : Ego te absolvo. Celui-ci va dire avec la même autorité : Ego te absolvo. Or c’est un acte de la puissance suprême ; il est plus grand, dit saint Augustin, que la création du ciel et de la terre. » — W. Allies, Journal d’un voyage en France, 1845, 97. « La confession est la chaîne qui lie toute la vie chrétienne. »
  2. Manrèze du prêtre, I, 36. « Sans doute, la mère de Dieu a plus de crédit que vous, mais elle a moins d’autorité. Sans doute, elle accorde des grâces, mais elle n’a pas donné une seule absolution. »