Aller au contenu

Page:Taine - Les Origines de la France contemporaine, t. 11, 1904.djvu/333

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
310
LE RÉGIME MODERNE


l’évêque diocésain avec un ecclésiastique désigné par lui ; d’ailleurs, par son crédit auprès du gouvernement central, elle jouit de toutes les complaisances administratives. Bref, d’en haut et de près, elle conduit, réprime, régente l’Université laïque, et, de 1849 à 1859, la domination et l’ingérence ecclésiastiques, les tracasseries, la compression, les destitutions[1], les disgrâces, renouvellent le régime qui de 1821 à 1828 a déjà sévi. Comme sous la Restauration, l’Église a mis sa main dans celle de l’État pour manœuvrer de concert avec lui la machine scolaire ; mais, comme sous la Restauration, elle s’est réservé la haute main, et, bien plus que lui, c’est elle qui manœuvre. En somme, sous le nom, l’affiche et la proclamation théorique de la liberté pour tous, le monopole universitaire se reconstitue, sinon de droit, du moins de fait, et en faveur de l’Église.

Vers 1859 et après la guerre d’Italie, à propos du pape et du pouvoir temporel, les deux mains jointes se desserrent, puis se séparent ; leur association se défait, les deux intérêts ne sont plus d’accord, et deux mots naissent, l’un et l’autre prédestinés à une grande fortune ; d’un côté apparaît l’intérêt « laïque », de l’autre côté l’intérêt « clérical » ; désormais le gouvernement ne subordonne plus le premier au second, et

  1. Ambroise Rendu et l’Université de France, par E, Rendu, 128 (janvier 1850). Pouvoir discrétionnaire donné aux préfets pour frapper parmi les instituteurs primaires « les fauteurs du socialisme ». — Six cent onze instituteurs révoqués. — Dans l’enseignement secondaire et dans l’enseignement supérieur, la répression et l’oppression ne furent pas moindres.