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Page:Taine - Les Origines de la France contemporaine, t. 11, 1904.djvu/371

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LE RÉGIME MODERNE


guère profité de leurs études ; mais cela prouve aussi que le programme de l’examen n’est pas adapté au type ordinaire des esprits, ni aux facultés natives de la majorité humaine, que beaucoup de jeunes gens capables d’apprendre par la méthode contraire n’apprennent rien par celle-ci, que l’enseignement, tel qu’il est, avec l’espèce et la grandeur du travail cérébral qu’il impose, avec son tour abstrait et théorique, excède la portée moyenne des intelligences et des mémoires. — En particulier, pendant la dernière année des études classiques, les élèves ont dû suivre le cours de philosophie : au temps de M. Laromiguière, cela pouvait leur être utile ; au temps de M. Cousin, le cours n’était pas encore très malfaisant ; aujourd’hui, tout imprégné de néo-kantisme, il ingère, dans des esprits de dix-huit, de dix-sept et même seize ans, une pâtée métaphysique aussi lourde que la scolastique du XIVe siècle, horriblement indigeste et malsaine pour ces estomacs novices : ils l’avalent en se distendant, et, à l’examen, la rendent telle quelle, toute crue, faute d’avoir pu se l’assimiler. — Souvent, après un échec au baccalauréat ou à l’entrée des écoles spéciales, les jeunes gens se mettent ou sont mis dans ce qu’ils nomment « une boîte » ou « un four » ; c’est un internat préparatoire, analogue aux boîtes dans lesquelles on élève les vers à soie, et aux fours où on fait

    n’oscillait pas entre 45 et 55 pour 100… Quand la proportion des ajournements a atteint le chiffre de 50 ou 55 pour 100,… les examinateurs admettent en gémissant, vu la dureté des temps, des candidats dont la moitié au moins serait rejetée par eux s’ils ne se sentaient les mains liées. »