Aller au contenu

Page:Taine - Les Origines de la France contemporaine, t. 2, 1910.djvu/271

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
253
LE PEUPLE


plus d’une fois les habitants de La Ferté, pour échapper aux droits, ont jeté leurs vins à la rivière, et l’assemblée provinciale déclare que « dans la majeure partie de la province, la plus légère augmentation des droits ferait déserter les terres à tous les cultivateurs ». — Telle est l’histoire du vin sous l’ancien régime. Depuis le vigneron qui produit jusqu’au cabaretier qui débite, que de gens vexés et quelles extorsions ! — Quant à la gabelle, de l’aveu d’un contrôleur général[1], elle entraîne chaque année 4000 saisies domiciliaires, 3400 emprisonnements, 500 condamnations au fouet, au bannissement, aux galères. — Si jamais il y eut deux impôts bien combinés, non seulement pour dépouiller, mais encore pour irriter les paysans, les pauvres et le peuple, ce sont ces deux-là.

VI

Il est donc manifeste que la pesanteur de l’impôt est la principale cause de la misère ; de là des haines accumulées et profondes contre le fisc et ses agents, receveurs, officiers des greniers, gens des aides, gens de l’octroi, douaniers et commis. — Mais pourquoi l’impôt est-il si pesant ? La réponse n’est pas douteuse, et tant de communes qui plaident chaque année contre messieurs tels ou tels pour les soumettre à la taille l’écrivent tout au long dans leurs requêtes. Ce qui rend la charge

  1. Mémoires présentés à l’Assemblée des Notables par M. de Calonne (1787), 67.


  anc. rég. ii.
T. II. — 17