Aller au contenu

Page:Taine - Les Origines de la France contemporaine, t. 5, 1904.djvu/71

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
67
LES JACOBINS


et tout de suite, avec Mounier, secrétaire des États du Dauphiné, et plusieurs députés des autres provinces, ils ont fondé une réunion qui durera. Jusqu’au 6 octobre, elle ne comprend que des représentants ; ensuite, transportée à Paris, rue Saint-Honoré, dans la bibliothèque du couvent des Jacobins, elle admet parmi ses membres d’autres hommes considérables ou connus, en première ligne Condorcet, puis Laharpe, M.-J. Chénier, Chamfort, David, Talma, des écrivains et des artistes, bientôt plus de mille personnes notables. — Rien de plus sérieux que son aspect : on y comptera deux cents, trois cents députés, et ses statuts semblent combinés pour rassembler une véritable élite. On n’y est admis que sur la présentation de dix membres et après un vote au scrutin. Pour assister aux séances, il faut une carte d’entrée, et il arrive un jour que l’un des deux commissaires chargés de vérifier les cartes à la porte est le jeune duc de Chartres. Il y a un bureau, un président. Les discussions ont la gravité parlementaire, et, aux termes des statuts, les questions agitées sont celles-là mêmes que débat l’Assemblée nationale[1] ; dans une salle basse, à d’autres heures, on instruit les ouvriers, on leur explique la Constitution. À regarder de loin, nulle Société n’est plus digne de conduire l’opinion ; de près, c’est autre chose ; mais, dans les départements, on ne la voit qu’à distance ; et, selon la vieille habitude implantée par la

  1. Règlement de la Société : « L’objet de la Société est de discuter les questions qui doivent être décidées par l’Assemblée nationale… et de correspondre avec les sociétés du même genre qui pourraient se former dans le royaume. »