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Page:Taine - Les Origines de la France contemporaine, t. 6, 1904.djvu/118

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LA RÉVOLUTION


le pillage est universel et en permanence. Seuls admis dans la garde nationale et aux fonctions publiques, les anciens brigands d’Avignon, avec la municipalité pour complice, font des rafles dans la ville et des razzias dans la campagne : dans la ville, 450 000 francs de « dons volontaires » versés aux meurtriers de la Glacière par les amis ou parents des morts ; dans la campagne, des rançons de 1000 à 10 000 livres imposées aux cultivateurs riches, sans compter les orgies de la conquête et les gaietés de l’arbitraire, les quêtes à main armée et à domicile pour arroser la plantation des innombrables arbres de la Liberté, les repas de 5 à 600 livres faits avec l’argent extorqué, la ripaille à discrétion et le dégât sans frein dans les fermes envahies[1], bref tous les abus de la force en goguette qui s’amuse de ses brutalités et s’enorgueillit de ses attentats.

Sur cette traînée de meurtres et de vols, le ministre arrive à Marseille, et subitement, j’imagine, il s’arrête avec une sorte de stupeur. Non pas qu’il soit étonné par les assassinats populaires ; sans doute, on lui en mande

    M. Casimir Audiffret (avec pièces à l’appui. Son fils avait été écroué par erreur à la place d’un autre Audiffret, habitant du Comtat, et il a été sabré dans sa prison, le 25 août. Rapport du chirurgien, 17 octobre : le blessé a encore deux grandes plaies à la tête, une à la joue gauche, et la jambe droite paralysée ; il a été transporté de prison en prison si rudement, qu’il a un abcès au poignet, et, si on persiste à le retenir, il mourra bientôt.

  1. Archives nationales, F7, 3195. Lettre de M. Amiel, président du bureau de conciliation, 28 octobre. — Lettre d’un habitant d’Avignon, 7 octobre. — Autres lettres non signées. — Lettre de M. Gilles, juge de paix, 25 janvier 1793.