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Page:Taine - Les Origines de la France contemporaine, t. 8, 1904.djvu/114

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LA RÉVOLUTION


deux jours ; au reste, un peu après, elles sont reprises et on les fusille. — La dernière troupe, que l’on nomme la Légion germanique, est formée de déserteurs ou mercenaires allemands, qui parlent à peine ou ne parlent pas le français, et la commission militaire les emploie aussi à expédier les Vendéennes ramassées sur les chemins ; ordinairement, ils les fusillent par vingt-cinq. « J’arrivai, dit un témoin oculaire[1], dans une espèce de gorge où était une carrière en forme de demi-cercle ; là, j’aperçus les cadavres de soixante-quinze femmes… nues et couchées sur le dos. » Celles qu’on amenait ce jour-là avaient de seize à dix-huit ans ; une d’elles dit à ses conducteurs : « Je vois bien que vous me conduisez à la mort », et l’Allemand, en son jargon estropié, lui répond, probablement avec un gros rire : « Non, cela est pour vous changer d’air ». On les range en haie devant les cadavres des journées précédentes, et on les fusille ; celles qui ne sont pas tombées voient recharger les fusils ; on les fusille de nouveau, et les blessées sont achevées à coup de crosse. Ensuite les Allemands viennent fouiller les mortes ; d’autres les mettent nues, et les « retournent sur le dos ». — Il a fallu, pour trouver les ouvriers de l’œuvre, descendre, non seulement jusqu’aux derniers scélérats de la France, mais encore jusqu’à des brutes de race et de langue étrangères, plus bas encore, jusqu’à des brutes de race

  1. Alfred Lallié, les Fusillades de Nantes, 23 (Déposition de Picard, commandant des gardes nationaux de l’escorte. — Cf. les dépositions de Henri Ferdinand, menuisier).