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Page:Taine - Les Origines de la France contemporaine, t. 8, 1904.djvu/432

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LA RÉVOLUTION


rent le faisceau par un dernier nœud. Dans ce monde préservé des souillures politiques et ennobli par l’habitude de l’abnégation[1], il y a tout ce qui constitue une société organisée et viable, une hiérarchie, non pas extérieure et plaquée, mais morale et intime, des titres incontestés, des supériorités reconnues, une subordination acceptée, des droits et des devoirs imprimés dans les consciences, bref ce qui a toujours manqué aux institutions révolutionnaires, la discipline des cœurs. Donnez à ces hommes une consigne, ils ne la discuteront pas ; pourvu qu’elle soit légale ou semble l’être, ils l’exécuteront, non seulement contre des étrangers, mais contre des Français ; c’est ainsi que déjà, le 13 Vendémiaire, ils ont mitraillé les Parisiens, et, le 18 Fructidor, purgé le Corps législatif. Vienne un général illustre : pourvu qu’il garde les formes, ils le suivront et recommenceront l’épuration encore une fois. — Il en vient un qui, depuis trois ans, ne pense pas à autre chose, mais qui cette fois ne veut faire l’opération qu’à son profit ; c’est le plus illustre de tous, et justement le conducteur ou promoteur des deux premières, celui-là même qui a fait, de sa personne, le 13 Vendémiaire, et, par les mains de son lieutenant Augereau, le 18 Fructidor. — Qu’il s’autorise d’un simulacre de décret, et se fasse nommer, par la minorité d’un des Conseils, commandant général de la force armée : la force armée marchera derrière lui. — Qu’il

  1. Journal de marche du sergent Fricasse. — Les Cahiers du capitaine Coignet. — Correspondance de Maurice Dupin, dans l’Histoire de ma vie, par G. Sand.