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Page:Tallemant des Réaux - Les historiettes, tome 1.djvu/166

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voit beaucoup de choses à redire, entre autres ce vers où il y a :

……Euboïcis Cumarum allabitur oris.
……Euboïcis CumÆneidos lib. 6, vers 2.


lui sembloit ridicule. « C’est, dit-il, comme si quelqu’un alloit mettre aux rives françoises de Paris. » Ne voilà-t-il pas une belle objection ! Stace lui sembloit bien plus beau. Pour les autres, il estimoit Horace, Juvénal, Martial, Ovide, et Sénèque le tragique.

Les Italiens ne lui revenoient point ; il disoit que les sonnets de Pétrarque étoient à la grecque, aussi bien que les épigrammes de mademoiselle de Gournay.

De tous leurs ouvrages il ne pouvoit souffrir que l’Aminte du Tasse[1].

À l’hôtel de Rambouillet on amena un jour je ne sais quel homme, qui disloquoit tout le corps aux gens et le remettoit sans leur faire mal. On l’éprouva sur un laquais. Malherbe, qui y étoit, voyant cela, lui dit : « Démettez-moi le coude. » Il ne sentit point de mal. Après il se le fit remettre aussi sans douleur. « Cependant, dit-il, si cet homme fût mort tandis que j’avois comme cela le coude démis, on auroit crié au curieux impertinent[2]. »

Il faisoit presque tous les jours sur le soir quelque petite conférence dans sa chambre avec Racan, Colomby[3], Maynard et quelques autres. Un habitant

  1. Toute cette partie a bien moins d’étendue dans Racan.
  2. Cette anecdote ne fait pas non plus partie du récit de Racan. Il y est fait allusion à la nouvelle de Cervantes insérée dans son roman, liv. 7, ch. 33. (Voyez l’Histoire de l’admirable Don Quichotte, tom. 2, pag. 82, Amsterdam, 1768.)
  3. François de Cauvigny, sieur de Colomby, parent de Malherbe ;