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Page:Tallemant des Réaux - Les historiettes, tome 1.djvu/279

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MADAME DE GIRONDE.


Revenons à la petite de Reniez. Son père, pour ôter cet objet de devant ses yeux, la donna à madame de Castel-Sagrat, sa sœur. Cette fille, dès l’âge de dix ans, fut admirée pour sa beauté et pour la vivacité de son esprit. Madame de Castel-Sagrat résolut de ne laisser point échapper un si bon parti, et de la marier à son second fils, qu’on appeloit le baron de Gironde, et elle les fit épouser que la fille n’avoit encore que onze ans, après avoir obtenu des dispenses du Roi, car ils étoient cousins-germains et huguenots. On dit que madame de Gironde eut de tous temps de l’aversion pour son mari, qui étoit un gros homme assez mal bâti ; mais cette aversion s’augmenta très-fort lorsqu’elle se vit cajolée des principaux et des mieux faits de la province ; car son mari l’ayant menée à Montauban, après les guerres de la religion, feu M. d’Épernon et M. de La Vallette, son fils, s’y rencontrèrent. Il y avoit aussi alors une autre dame, nommée madame d’Islemade, qui seule pouvoit disputer de beauté avec madame de Gironde. Le père se donna à celle-ci et le fils à l’autre, et toute la ville avec la noblesse des environs se partageant à leur exemple, ce fut comme une petite guerre civile, bien différente de celle dont on venoit de sortir. On dit pourtant que M. d’Épernon n’en eut aucune faveur que de bienséance.

La peste vint là-dessus qui interrompit toutes les