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Page:Tarde - L’Opposition universelle, Alcan, 1897.djvu/132

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comparés. Ce que j’aperçois de très clair, c’est que, par n’importe lequel des modes de reproduction, gemmiparité, scissiparité, accouplement, l’individu se répète au dehors, comme, en se nourrissant, il se répète au-dedans, mais, pas plus là qu’ici, il ne s’oppose à lui-même[1].

Cette opposition prétendue est cependant très propre à nous révéler le véritable rapport des oppositions en général avec les répétitions universelles. S’il y a, dans l’univers, des oppositions (rythmiques au moins), n’est-ce pas tout simplement parce qu’il faut qu’il y ait des répétitions, en vue des variations dont celles-ci sont le canevas indispensable ? Il est nécessaire que, pour se répéter, une série de changements, au bout d’un temps, revienne sur elle-même, et, de là, le tourbillon vital, la rotation des phénomènes moléculaires de la cellule, comme la gravitation des astres ou la chute et la montée alternatives des eaux dans l’atmosphère ; mais il n’est pas nécessaire que la série des changements revienne toujours sur elle-même par les mêmes chemins, comme le prouve notamment le dernier des exemples choisis. Voila pourquoi il n’est pas vrai que tout soit rythmique dans la nature, et pourquoi le domaine des répétitions et des similitudes véritables, précises et complètes, y est beaucoup plus étendu que celui des oppositions et des symétries véritables,

  1. Au fond, l’inglutition des aliments et la fécondation ont les plus grands rapports. Peut-être n’y-a-t-il, entre manger et s’accoupler, qu’une différence de degré, il est vrai très profonde. Dans un cas, la cellule vivante reçoit un aliment inorganique, dans l’autre un aliment organique, plus complexe et plus délicat, en vue d’une fonction supérieure. D y a, entre les deux, la même différence qu’entre le développement de l’esprit par le simple spectacle des objets extérieurs et son développement par la lecture d’un livre très instructif.