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Page:Tarde - L’Opposition universelle, Alcan, 1897.djvu/156

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encore à inventer, à l’heure voulue, de nouvelles et meilleures manières d’acquérir. On comprend qu’une si haute cupidité, qu’une force hyperphysique de cette nature, puisse, si elle existe, être unie à une faculté d’invention, de combinaison et de prévoyance, qui n’a point non plus les caractères d’une cause mécanique et positive. Et des lors on sent l’inutilité de se torturer le cerveau pour expliquer mécaniquement et positivement les métamorphoses de la vie, son évolution ascendante et transcendante, l’instinct de l’insecte, l’esprit de l’homme, quand on n’est même pas en mesure d’expliquer ainsi son évolution simplement extensive par voie de génération ou de nutrition. Car peut-on dire que l’action des forces incidentes du dehors pousse à cette propagande vitale qui tend à subjuguer vitalement ces forces extérieures ? Il n’est pas d’ailleurs jusqu’aux phénomènes les plus vulgaires, les vrilles par lesquelles les plantes se prennent aux objets environnants, les petits appareils destinés à projeter le pollen de certaines fleurs, les graines plumeuses, l’enroulement des tiges, etc., qui ne soient tout à fait inexplicables par l’action des forces incidentes et qui n’attestent au contraire manifestement l’ambitieuse voracité et rapacité de la vie.

La vie est un secret qui se transmet, non pas de cellule à cellule (car la vie a précédé la cellule, qu’elle a formée) mais de molécule à molécule. C’est une sorte de franc-maçonnerie moléculaire qui, née d’un besoin profond de domination absolue, s’y achemine séculairement, à la fois exclusive et envahissante. Les molécules non initiées sont aussi incapables de reproduire les merveilles de l’organisation ou de les comprendre à fond que peut l’être le public de lire une dépêche