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Page:Tarde - L’Opposition universelle, Alcan, 1897.djvu/206

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on peut être porté à admettre que l’étendue et la durée de nos sensations sont des quantités apparentes, ou se traduisent purement et simplement, en langage sensationnel, les deux seules quantités vraies de la conscience, croyance et désir. Quoi qu’il en soit cependant, il reste certain que l’opposition du plus et du moins présentée par les impressions de nos sens est bien réelle, et les psycho-physiciens ont eu raison de s’y attacher. Mais il résulte aussi de leurs recherches que, considérée comme susceptible d’augmentation ou de diminution, la sensation est plutôt un nombre qu’une quantité. Ce qui est une quantité, une grandeur continue, c’est l’excitation extérieure ; mais, quand elle croît avec continuité, quand, par exemple, l’ampleur des vibrations sonores ou lumineuses va en augmentant, ou la pression d’un poids pose sur notre main, ou la température d’un liquide dans lequel notre main est trempée, l’intensité de notre sensation acoustique, visuelle, tactile, ne la suit pas dans chacun de ses progrès infinitésimaux. Elle ne s’élève que par petits bonds intermittents séparés par des intervalles ou elle reste la même quoique sa condition physique ait continue à grandir. À une série continue de l’excitation correspond une série discontinue de la sensation, qui est nombrée plutôt que mesurée dans la conscience. Et c’est à raison de ce caractère numérique de la sensation que la loi de Weber se vérifié jusqu’à un certain point. En effet, non seulement il faut que l’excitation, à partir du point ou elle est perçue, ait atteint un certain degré d’augmentation pour que son accroissement devienne lui-même perceptible, et ainsi de suite, mais encore la quantité dont elle doit s’accroître ainsi, une seconde, une