Aller au contenu

Page:Tarde - L’Opposition universelle, Alcan, 1897.djvu/243

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

Nous ne distinguerons donc que deux classes d’instincts comme de sentiments : les positifs et les négatifs. Parmi les instincts positifs, on doit ranger tous les instincts industriels, producteurs ou migrateurs, la nidification, la mellification, le choix des plantes bonnes à manger, l’attrait sexuel. Parmi les instincts négatifs, tous les instincts destructeurs et belliqueux, le rejet inné de certains aliments, la répugnance innée à certains contacts, la fuite instinctive de certains animaux, l’attaque instinctive de certains autres, etc. À vrai dire, tous les instincts un peu complexes sont à la fois positifs et négatifs, mais à des degrés très différents. L’instinct général de conservation et de progrès auquel ils se ramènent tous présente une double forme, alternativement offensive et défensive. L’oiseau qui bâtit son nid choisit tel brin de paille, rejette tel fil de fer ; l’abeille qui fait son miel s’écarte de certaines fleurs pour pénétrer dans d’autres. Le chien de chasse sait qu’il doit s’arrêter devant tel animal, non devant tel autre. — Et il n’est pas inutile de remarquer que ces divers instincts sont loin d’avoir tous le même degré d’intensité, de force contraignante. Sans cela, lorsqu’ils se trouvent en conflit dans un esprit animal, l’individu serait forcé de rester en panne, paralysé entre deux tendances égales et contraires. Puisqu’il en est autrement, c’est que les désirs instinctifs, et aussi bien les croyances instinctives, sont très inégalement intenses. L’hirondelle-mère qui hésite entre l’instinct migrateur et l’instinct maternel, quand ses petits ne sont pas encore drus à l’époque de la migration périodique, n’hésite pas longtemps, et c’est tantôt l’un tantôt l’autre de ces