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Page:Tarde - L’Opposition universelle, Alcan, 1897.djvu/317

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de leur généralité décroissante et de leur complexité croissante, suivant la loi d’Auguste Comte, et dont les précédentes appelaient les suivantes, appel auquel l’accident du génie individuel pouvait seul répondre dans certains cas, mais sans lequel le génie eût fait une inutile apparition. Ce n’est pas que, dans le détail, tout soit logiquement enchaîné, et Comte s’abuse quand il croit démontrer que la découverte de la circulation du sang, par exemple, devait nécessairement précéder celle de toutes les autres fonctions du corps. Mais, dans leur ensemble, les connaissances scientifiques forment une chaîne rationnelle dont le premier anneau est fourni par les données primitives des sens ; et c’est, avec le développement de l’industrie qui en est la conséquence, l’enchaînement le plus rigoureux que présente la vie sociale. Or il n’est pas de côté de l’évolution sociale qui, plus que le côté scientifique, exclue l’idée de réversion, et qui donne un démenti plus complet au préjugé d’une ressemblance symétrique entre l’évolution et la dissolution. Personne encore n’a osé imaginer que, dans une société parvenue à notre degré de lumières et en train de se dissoudre, la perte graduelle des connaissances et des théories s’opérerait dans l’ordre précisément inverse de leur acquisition et nous ramènerait, en chimie, aux idées de Berzelius, puis de Stahl, puis de Raymond Lulle ; en astronomie, au système de Ptolémée ; en anatomie, aux idées de Galien et d’Hippocrate. Si l’on adopte la loi des trois états, incontestable à certains égards, on ne croira jamais que chaque science, après avoir atteint sa phase positive, reculera vers la phase métaphysique ou théologique de ses origines, ou, si l’on admet la