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Page:Tarde - L’Opposition universelle, Alcan, 1897.djvu/359

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Linguistiquement, la statistique ne nous fournit presque pas d’informations. Elle ne nous donne que des chiffres approximatifs sur le nombre de gens parlant français, allemand, anglais, espagnol. Elle devrait au moins, sur la frontière de langues contiguës et rivales, fonctionner soigneusement pour noter les empiétements d’un idiome sur l’autre. On verrait si c’est toujours le même qui empiète en plusieurs endroits différents, au nord comme au sud, à l’ouest comme à l’est ; ou bien si c’est tantôt l’un tantôt l’autre. Dans le premier cas, on aurait lieu de penser que cela tient à quelque avantage intrinsèque de l’idiome conquérant ; dans le second cas, à des influences extérieures. Mais nous reviendrons plus loin, à propos des oppositions dynamiques, sur ces batailles de langues. — En ce qui concerne chaque langue prise à part, si l’on pouvait noter et chiffrer jour par jour l’emploi de chaque mot, de chaque tournure de phrase, par chacun de ceux qui la parlent, on aurait en colonnes de chiffres, effrayantes de longueur à la vérité, le tableau le plus fidèle des transformations internes de l’idiome. Entre l’expression ancienne et l’expression nouvelle d’une même idée, on saurait les péripéties de leur lutte silencieuse, la vitesse d’accroissement de l’innovation et la rapidité de désuétude du terme archaïque. Mais, encore ici, c’est une opposition dynamique qui s’offre à nous comme cause d’une opposition quantitative, d’une baisse succédant à une hausse. Et cela ne doit pas nous surprendre : peut-être, au fond, en est-il toujours ainsi. Nous le verrons tout à l’heure.

La statistique de l’industrie et du commerce, sur laquelle roulent les instructives publications de l’Office du Travail et